Piazz’a u libru – Bernard Biancarelli (Albiana) : « lire permet l’émancipation de l’être humain »

Aujourd’hui directeur des Editions Albiana, Bernard Biancarelli connaît bien la maison pour être pensionnaire depuis un quart de siècle de cette véritable institution créée par Guy Firroloni en 1983. Les Editions Albiana font par partie des éditeurs qui seront présents à partir de samedi lors de la seconde édition de Piazz’à u Libru au Bastion de France.

L’occasion d’évoquer avec son directeur l’état de santé de ce secteur à l’échelle insulaire mais, également, d’explorer d’autres chemins en lien avec la pratique de la lecture et son importance dans la construction de l’être humain.

Bernard Biancarelli après un quart de siècle d’immersion au cœur des Editions Albiana quel regard portez-vous sur le secteur de l’édition en Corse ?
L’édition corse est, depuis ses débuts dans les années 70, un milieu paradoxal. D’une grande fragilité économique, elle est d’une grande vitalité culturelle. Cette dernière caractéristique a permis son développement et son maintien jusqu’à aujourd’hui car elle est portée par la passion et l’engagement des acteurs et le soutien des lecteurs – la Corse est un des département où on lirait le plus. Mais ce modèle local est en train de s’effriter dangereusement. Inutile de préciser que nos modes de vie sont en bascule depuis quelques années, que le processus s’accélère et que cela a un impact sur la place du livre dans la culture de chacun.

Les Éditions Albiana seront présentes pour la deuxième édition de Piazz’à u libru

Que dit la lecture de notre mode de vie ?
Eh bien que nous sommes collectivement en train de choisir entre un monde avec des livres ou sans. Ce qui ne veut pas dire avec ou sans lecture, mais seulement pour l’instant ! Si le support change, passant du livre à l’écran, je crains fort que nous passions d’une façon d’appréhender le monde à une autre : de celui de la recherche d’émancipation personnelle à celui de la crainte et de la réaction. Un monde sans livres produit des réactionnaires. C’est un grave enjeu de société qui se cache derrière la question du livre.

 

 

C’est un miracle que d’avoir une telle filière, aussi riche, dans un si petit pays

 

En quoi un festival comme Piazz’à u Libru est un moment important dans la saison littéraire ?
Piazz’à u libru est une dénomination qui dit tout du projet : place au livre ! (Re-)faire une place au livre, est à la portée de tous, institutions locales ou nationales, associations, médias, parents,… à commencer bien entendu par soi-même ! Je rêve pour ma part d’une synergie en la matière. Ainsi, ce genre d’événement contribue à rapprocher les uns des autres et je ne peux que m’en réjouir. Par ailleurs, il est important pour les éditeurs car il permet de mettre en évidence l’incroyable travail effectué en Corse au profit de sa culture : langue, patrimoine, loisir, création, jeunesse,… c’est un miracle que d’avoir une telle filière, aussi riche, dans un si petit pays.

Si vous deviez développer l’expression suivante:  » la lecture c’est la liberté » ?
La liberté individuelle la plus intime se conquiert par la lecture. On n’est jamais aussi libre que lorsqu’on lit un livre : personne n’entre dans notre bulle quand nous avons un livre en main. Même l’auteur est incapable de nous dire comment comprendre ou ressentir exactement ce qu’il a écrit. C’est ainsi que tandis que nous plongeons dans le livre de quelqu’un, on plonge en fait en nous-même et nous allons où nous voulons, si nous le voulons. Nous n’avons pas à « réagir », nous prenons le temps de penser. Ce qui contribue d’ailleurs, à diminuer considérablement nos angoisses. Par la connaissance et la réflexion, nous dominons au moins notre petit monde intérieur…

Ritrattu : Corse matin (F. Selvini)

Votre navigateur est dépassé !

Mettez à jour votre navigateur pour voir ce site internet correctement. Mettre à jour mon navigateur

×